La transmission selon Arnold Van Gennep

Il y a, chez tous les peuples, à des degrés variables selon les époques, des courants incessants du populaire à l’individuel et de l’individuel au populaire.

En ceci, le fait littéraire obéit à la loi générale du développement des civilisations. Il y a une production de techniques, d’arts, d’idées et de sentiments incessante, que les hommes ordinaires supportent et transmettent inconsciemment. Mais les mieux doués choisissent dans ce fonds amorphe, modifient, modèlent, individualisent. Puis le produit ainsi frappé rentre dans la circulation générale, passe de mains en mains, de cerveaux en cerveaux, et s’use. La collectivité s’en sert si elle le juge bon, sans s’occuper du nom du graveur, dont seuls s’inquiètent les savants, les artistes et les collectionneurs.

Mais ce n’est pas aux savants ni aux curieux seuls que le folk-lore a dû de se développer si vite au XIXe siècle. Un phénomène d’ordre à la fois politique et sentimental y a puissamment contribué. Le principe des nationalités, en effet, devait de toute nécessité se fonder pour sa théorie sur une connaissance exacte de ce qui était vraiment « national »…

 

Notes :

Arnold van Gennep, LA FORMATION DES LÉGENDES. (1929) PP. 15 et 16


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